Six heures du matin. Le soleil peine à s’éveiller. Il fait encore sombre et un tout petit peu frais lorsque je quitte l’enceinte confortable de notre nouvelle maison pour me rendre au goudron. (Lire « la route asphaltée ») Ce matin, je suis invitée à prendre un marche style « safari photo » dans le quartier de ma nouvelle amie Ariane, rencontrée à la piscine.
En marchant dans ma rue, les gardiens de maisons me reconnaissent et me saluent. Arrivée au goudron, pas de taxi. Je marche pendant un bon moment avant de réussir à en dénicher un. « Le dimanche, la ville s’éveille différemment des autres jours de la semaine », me dit le chauffeur de taxi. Ariane et son gardien m’attendent déjà dans la rue, prêts pour l’aventure.
Les rues sont de sable fin. Pas si facile d’y marcher… sauf que, marcher dans le sable ressemble étrangement à marcher dans la neige. On glisse, on dérape, on glisse encore. Le sable, c’est glissant et de plus, il s’infiltre dans toutes les ouvertures de mes espadrilles.
Ariane connait les gens de son quartier et ceux-ci lui rendent bien. Elle a pris l’habitude de marcher le matin, avant la chaleur torride. Elle prend des photos, imprime les meilleures sur du joli papier glacé et remet une copie à chacun des individus photographiés la semaine précédente. Doucement, grâce à son gardien, nous élaborons de petites conversations mais le langage des signes fonctionne à merveille, si bien que la dame qui cuit des beignets m’en offre un plein sac.
Il y a de l’action et de l’inaction dans ce quartier à cette heure matinale.
Il y a des gens qui dorment dehors, sur des nattes ou directement sur le sol, entre les murs de maisons et la rue.
Il y a des femmes qui balaient fièrement la rue devant leur maison avec des balais fait de branches sèches du désert.
Il y a les vaches qui cherchent leur nourriture dans les sites d’enfouissement de déchets jalonnant les extrémités de la ville. Elles mangent ce qui s’y trouve. J’imagine que vous avez déjà deviné : des sacs de plastique! J’en ai jasé avec Sanda. Il connait les vaches. Le plastique, dans tout le Niger, est en train d’handicaper sérieusement le cheptel de haute qualité des éleveurs de bovins. L’effet est désastreux . « Les vaches ne peuvent pas digérer le plastique, se mettent à maigrir et meurent », m’a dit Sanda l’autre jour. J’ai entendu parler d’un pays africain qui banni le plastique dans tout le pays! Serait-il possible d’envisager cette solution ici, au Canada ou partout dans le monde?
Il y a le sympathique blanchisseur qui a déjà commencé à frotter, frotter, rincer et tordre le linge.
Il y a de jeunes garçons, très jeunes (plus ou moins de 10 ans) qui sont déjà au travail dans les sites de gestion de déchets situés en périphérie de la ville. Dès le lever du soleil, ces jeunes s’activent à collectionner tout le carton jeté au rebus. Ils empilent leur butin dans des brouettes d’une autre époque et vont le revendre pour assurer leur apport en nourriture de la journée. Vous savez ce que j’ai remarqué? Ils sont joyeux.. visiblement « heureux ». Et lorsque nous avons une difficulté à localiser une personne pour lui remettre sa photo, ce sont eux qui nous aident.
Paradoxalement, la vie semble belle même dans les poubelles…
Louise
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