Sanda m’a finalement
invitée pour un repas chez lui. Il avait
hésité. J’ai insisté un peu. Il me disait :
- Chez
moi, pas de frigo. Chez moi, pas de maison. Toi connais en brousse? C’est comme ça chez moi.
Oui. Je connais sa maison en brousse faites de
quatre bâtons bien planté dans le sable et d’une toile attachée aux extrémités
des bâtons qui sert de toiture. Mais, je voulais voir où et comment il vit
quand il vient en ville.
C’est Ousmane,
un ami de Sanda, qui est venu nous chercher, Liliane, ma colocataire, et
moi. Liliane était contente de
participer de plein pied à l’expérience nigérienne Peule Wodaabé authentique et
l’occasion était en effet bien choisie.
Les femmes qui ont préparé le repas. Hissi est la 2e |
La maison de Hissi et Sanda est située dans un quartier achalandé de Niamey, près du petit marché, il me semble. Pour y accéder, il faut entrer dans l’enceinte d’une ONG qui travaille avec des jeunes filles. Ici, on appelle ces écoles professionnelles « foyer féminin ». La cour est grande au premier coup d’œil. Il y a deux bâtiments, presque côte à côte. L’un est l’école de couture et de broderie et l’autre est une médersa. La médersa est l’école coranique où l’on envoie les jeunes filles apprendre le coran par cœur au lieu d’apprendre à lire, à écrire et à compter. Ces écoles ont pris une importance visible depuis mon dernier voyage et la preuve est aussi visible : les jeunes filles et les femmes de Niamey sont de plus en plus voilées. On en voit partout. En 2005, on ne voyait pas de femmes voilées. Je me suis informée. On me répond qu’elles ne sont pas obligées mais c’est la mode… J’ose douter.
L'intérieur de sa maison |
- Hissi
est toute trempée…
Je croyais
qu’elle s’était fait prendre par la pluie alors qu’elle marchait sur la
route. Mais maintenant, je comprends…
Elle était dans sa « maison ».
Son abri est construit sur un terrain qui ne lui appartient pas. Il s’est installé là, dans un coin. Juste à côté de sa case, il y en a une autre, semblable. Je ne pourrais pas dire combien de personnes vivent dans ces deux cases mais il y en beaucoup.
Exactement comme il y a presque 11 ans, sur la natte des hommes |
- C’est
moi! dit-il, en montrant sa photo qui
apparait sur la couverture de mon livre « Les touristes ne vont pas à
Abalak ».
Je le
reconnais à peine… Il a dû vieillir de 50 ans en 8 ans.
Bientôt,
Hissi avance vers la natte des hommes transportant entre ses mains fragiles une
grande calebasse puis une plus petite sur le dessus. Il y a aussi plusieurs cuillères de métal.
Elle dépose ce butin sur le sable non loin de la natte, sans dire mot, les yeux
baissés puis retourne vers le coin des femmes. Nous ne la reverrons plus.
Bouche-bée,
Liliane observe la scène. C’est Ousmane
qui nous explique :
- C’est
par respect.
Puis, Sanda
se lève doucement, prend le tout entre ses mains et dépose les calebasses au
centre de la natte. Comme un maître de cérémonie, il verse sur le riz un peu de
sauce brune et quelques morceaux de bœuf et distribue les cuillères. Tous assis par terre autour de la calebasse, nous prenons le repas du midi.
Lorsque
rassasié chacun s’éloigne de la calebasse, Sanda la reprend et l’offre à de
jeunes gens qui viennent d’arriver, vraisemblablement attirés par l’odeur de
nourriture.
Juste à côté de la natte, un autre homme prépare le thé. Pour l’occasion, Sanda a fait acheter un bloc de sucre… comme en 2002 en brousse. Lorsque je lui demande de fendre le bloc avec son épée comme il le faisait avec une grande élégance en ce temps-là, il fait signe que non. Il n’a plus son épée et préfère éviter le sujet de conversation. La vie change, même dans le désert… On nous offre le premier thé, une gorgée. Puis, le second, une autre gorgée. Dans le désert, même le minuscule verre de thé se partage.
Sanda nous
raccompagne au goudron où il déniche un taxi qui nous ramènera à notre villa moderne
et confortable.
C’est ainsi
que se vit mon premier repas chez Sanda.
De lointains souvenirs, un peu frais tout de même. Petit Marché ou Château 1 il y a de ces agglomérations autour des regroupements de commodités dans Niamey. Intéressant, Louise. Tu t'es même payée un boubou de riche vert. Quelle élégance. Autre sujet, dois-je demander une minute de silence au Salon du livre de La Sarre à cause de ton absence? Ça sera pas pareil que l'an dernier chère Aga bori.
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