Youssouf Ibrahima, Niamey |
Sans avertir ses parents, il crée, en 2009, sa petite ONG avec quelques amis de sa classe. Ils se nomment: “EIB” qui signifie: Enfants Indépendants Bienveillants. Au début, leur objectif était fort simple: “Nous étions des justiciers”, me dit-il.
- On assurait la paix dans la cour de récréation, continue-t-il. Si des enfants se bagarraient, on les incitait à arrêter de se battre. S’ils n’arrêtaient pas, on les traînait chez le directeur. C’est pourquoi, on a choisi le nom Enfants Indépendants Bienveillants.
- Et tu ne parlais pas de cela avec tes parents?
- Non, au début, ce n’était qu’un jeu qu’on s’était inventé. Par la suite, on a pris cela au sérieux et on a écrit des règlements et une mission pour EIB.
Un jour, on cogne à la porte de la maison de la famille de Youssouf. C’est une autre maman, qui, curieuse, demande:
- C’est bien ici que Youssouf habite?
- Oui, répond la maman de Youssouf. Je peux savoir pourquoi? Il est arrivé quelque chose?
- C’est simplement que mon fils ne cesse de me parler de Youssouf. Il ne cesse de me demander la permission de faire partie de son ONG. Alors, j’aimerais lui poser quelques questions.
- Son ONG?, questionne la maman de Youssouf. Youssouf, viens ici. Explique moi! Qu’est-ce que cette idée d’ONG?
Et Youssouf se met à expliquer leur fonctionnement et les actions qu’ils mènent dans leur quartier afin de venir en aide aux enfants ciblés par eux selon des critères déterminés.
Les deux mamans, bouches bées, ne peuvent qu’acquiescer.
Enfants Indépendants Bienveillants est un organisme qui vient en aide aux enfants plus démunis qui vivent dans les environs. EIF fournit, une fois par mois, de la nourriture aux enfants qu’ils ont identifiés parce qu’ils ne mangent pas à leur faim.
- Mais, d’où vient votre financement? lui demandai-je.
- Nous faisons de l’autofinancement. Chaque jour, nos parents nous donnent 200 fcfa pour la collation du jour. De ce 200 francs, nous soustrayons 100 francs que nous déposons dans une petite caisse en métal que le trésorier garde. Le samedi, nous allons au Centre Culturel Français Nigérien (CCFN) pour notre rencontre hebdomadaire, sur la terrasse. Ensuite, nous passons à la bibliothèque emprunter des livres pour la semaine. Puis, une fois par mois, nous revenons par le petit marché afin d’acheter les provisions que nous allons distribuer aux enfants. Voilà.
Et Youssouf, de continuer, d'un seul trait. "Aujourd’hui, nous sommes plus grands. Nos parents nous donnent 500 francs par jour pour la collation. De ce 500 francs, nous soustrayons 200 francs pour la caisse commune."
- Avez-vous assez de francs pour manger une bonne collation?
- Mais oui. On achète un quart de sandwiche ou un demi et une sucrerie*. Ç’est suffisant.
- Et votre autofinancement fonctionne?
- Oui! Bientôt, nous ouvrirons un compte dans une banque. Nous voulons assurer une pérennité à nos actions.
La veille de notre rencontre, l’année scolaire s’achevait. Avant de partir en vacances, les membres de EIB se sont donnés une mission: observer, garder l’oeil ouvert afin de trouver d’autres enfants dans le besoin . À la rentrée, chacun présentera son rapport à l’assemblée.
Pour terminer, je laisse la plume à Youssouf. Il m’a expliqué qu’un jour, chacun des membres a donné son opinion pour définir la mission de EIB. Puis, il a pris toutes les idées et a conçu ce texte qui fait maintenant partie des statuts et règlements de EIB. Le voici:
Nous, à EIB’ nous sommes des enfants et nous sommes fiers de l’ëtre. C’est pourquoi nous nous engageons à défendre nos compatriotes enfants qui souffrent ici au Niger et partout dans le monde. Ici, à EIB, nous ne comptons ni sur l’âge, ni sur a force, nous comptons sur la persistence et la bonne foi.
Enfant, qui que tu sois, où que tu sois, ne te laisses pas maltraiter. Sors et défends toi!
J'aimerais recroiser Youssouf Ibrahima dans quelques années... À suivre...
Louise
Louise
* Une sucrerie est une boisson gazeuse au Niger.
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